SAF qui peut !

SAF qui peut !

SAF qui peut !

En février 2022, les patrons d’Airbus, Rolls-Royce et Safran signaient le Global Sustainable Aviation Fuel Declaration.

Dans ce document, les trois industriels expliquent que pour atteindre la neutralité carbone en 2050, l’industrie aéronautique compte principalement sur la généralisation du SAF (Sustainable Aviation Fuel), sans omettre de citer l’hydrogène et l’électrique dont la faisabilité technique semble plus hasardeuse.

La déclaration cite deux obstacles principaux à surmonter pour atteindre l’objectif :

  • la disponibilité du SAF au regard des besoins de l’aviation,
  • son coût de production, comparé à celui du kérosène.

Concernant la disponibilité du SAF

La Déclaration de février 2022, reconnait que :

  • la quantité de SAF nécessaire en 2050 sera de 500 M tonnes de SAF compte tenu de l’augmentation du trafic attendue et malgré les améliorations espérées : moteurs, aérodynamisme, … Rappelons que l’aviation a consommé 300 M de tonnes de kérosène en 2019,
  • la production de SAF s’est limitée à 40 K tonnes de SAF en 2019,
  • elle est attendue à 4 M de tonnes en 2025.

Il y a donc un facteur x10 000 à trouver à partir de la production réelle de 2019 pour atteindre l’objectif de neutralité de 2050.

Cela signifie qu’il faudra trouver les investissements pour produire ces quantités.
A titre d’exemple, l’usine de Neste à Singapore représente un investissement de 1,9 Md€ pour une production attendue de 700 K tonnes de SAF fin 2023 (source).
Enfin, notons que plusieurs des procédés validés ou proches de leur utilisation opérationnelle utilisent des ressources limitées (biomasse, huiles de cuisson usagée, glucose tiré des végétaux, déchets du bois, …), qui ne sont pas extensibles.

Concernant son coût de production

Au delà de l’amortissement de ces investissements colossaux, ces SAF sont beaucoup plus chers que le kérosène actuel.
Entre 3 à 5 fois plus pour la filière oléochimique (HEFA) qui utilise les huiles usagées par exemple.
Même si un procédé expérimental est toujours plus cher que ce qu’il sera une fois industrialisé, tout indique que le SAF restera plus coûteux que le kérosène même si c’est dans une moindre proportion que 3 fois plus. 
Qui acceptera de payer la différence de prix ?

Commentaires CFDT :

La mise en place du SAF (pierre angulaire de la décarbonation selon la DG de Safran) ne se fera pas aux mêmes volumes que le kérosène actuel sans un investissement très important ni une hausse du prix du billet d’avion.
Tous ces paramètres contribueront de facto à réduire le volume des passagers transportés par an et donc à une réduction du volume de nos productions d’avions.
Ajoutons que des publications du Shift Project ou des déclarations publiques du Président d’Aéroport de Paris vont dans le sens d’une nécessaire réduction du volume des trajets aériens.

Compte tenu de tous ces éléments, nous ne pouvons pas continuer de faire semblant de croire que les arbres monteront jusqu’au ciel indéfiniment.
Il est donc indispensable que la Direction de Safran (et celles des autres acteurs de l’aviation) s’explique sur :

  • quel impact aura la généralisation du SAF sur la hausse des billets d’avion ?
  • quel impact aura ce surcoût sur le trafic aérien et donc à quelles baisses de cadences de production devons-nous nous attendre ?
  • quel impact social aura ce ralentissement des cadences et comment nous y préparons-nous ?